Tayris était assis sur la berge du fleuve, contemplant l'eau qui coulait en contrebas. Il ne savait pas depuis combien de temps il était là, peut-être une heure. Ou depuis l'aube, lui souffla son instinct. 
La veille, les Athéniens étaient venus leur rendre une petite surprise dans leur village, accusant Luna d'avoir tué Cassiopée ; ce qui n'était pas faux. Après une discution, ils s'en étaient allés, et Tayris ainsi que la panthère des neiges étaient partis se coucher. Le coyote avait du mal à trouver le sommeil alors il était partit aux premières lueurs du soleil au fleuve. Il avait toujours aimé cet endroit.

J'ouvris grand la gueule et baillai un bon coup. Je m'étirais pattes, dos, tête. Puis je me dirigeai vers le Fleuve.
La petite toilette du matin.
Arrivée au Fleuve, les yeux encore à demi-fermés, j'aperçus Tayris.
- Bonjour, grommelai-je.
Je me raclai la gorge et entrepris de déjeuner. J'attrapai deux truites, une sardine et un saumon.
Je jetai le saumon devant Tayris et lui lançai :
- Bon appétit.
De mon côté, je dégustai silencieusement mes poissons, puis m'allongeai sur le sol.
- J'espère que les Athéniens vont se tenir tranquille, dis-je d'un ton nonchalant.
Le soleil apparut derrière les nuages. Ravie, je me retournai sur le dos, pattes en l'air.
Aaaah, quelle belle journée.
Je me redressai, regardai Tayris et demandai soudain :
- Tayris... tu as déjà eu une femelle dans ton passé ? Parce que... je me demande si le fait que Cœur de Cendre et Kléa soient ensemble est une bonne chose... pour nous.
Bien sûr que non que ce n'est pas une bonne chose ! tonna Cassiopée, dans ma tête. Ni pour eux, ni pour vous. Ils sont abrutis par leurs sentiments l'un pour l'autre, ils passent leurs journées à se chanter la sérénade, mais je t'assure que le jour où tu tueras l'un d'entre eux comme tu m'as tuée moi, ils vont te faire la peau.

Luna était arrivée, l'air encore endormie. Elle attrapa un poisson pour elle puis un pour lui. 
Merci, la remercia le coyote. Il croqua à pleines dents dans l'animal, savourant la chair fondante et chaude. 
J'espère aussi qu'il ne nous causeront plus d'ennuis pour le moment. Ils m'ennuient à toujours débarquer comme ça... 
Tayris reprit une bouchée du poisson, avant de l'avaler difficilement en entendant la question de sa meneuse.
Tayris... tu as déjà eu une femelle dans ton passé ?  
Le veilleur plongea son regard dans celui de Luna. Il n'évoquait que de la tristesse, et de la honte. 
Oui, finit-il par formuler. C'était ma mère. Et elle est morte. 

Ce n'était pas ce que voulais dire.
- Tayris, je voulais parler de compagne. D'amour. Tu comprends ce que je veux dire ?
Je regardai au loin, en pensant à ma propre famille.
Les miens aussi sont morts..., me dis-je.
La seule famille qui aurait pu te rester, c'est moi, dit sèchement Cassiopée, mais tu as tenu à rejoindre les Arréziens, puis tu m'as tuée. Alors cesse de te plaindre.
Non... maintenant, ma famille, c'est Tayris.
Je me rapprochai imperceptiblement de Tayris. Le matin, j'étais souvent d'humeur affectueuse.
Je baillai à nouveau, et passai de petits coups de langue sur mes pattes, et nettoyai mes coussinets.

Tayris regarda Luna, le regard perdu dans le vide. Il élida la question, ne sachant que répondre. 
Des bribes de scènes lui revenaient en mémoire, et le coyote regardait à présent le fleuve, comme hypnotisé.

Tay ! Une magnifique coyote appelait son petit pour qu'il vienne se coucher dans la grotte familiale. Ce dernier était assis sur le rocher, qui surplombait une partie du territoire des canides. Le couché du soleil avait toujours eu une action hypnotisante sur le jeune canidé. Mais ce soir, le ciel avait une teinte étrange. Il se passait quelque chose de pas net, c'est sur. Mais, alors que même les abeilles ne bourdonnaient plus, Tayris se décida à rentrer. Tout d'un coup, alors qu'il venait de faire un pas, une étrange douleur naquit en lui, et il en fut comme paralysé. 


Le veilleur n'avait toujours pas bougé. Ces scènes, il les revoyait sans cesse. La nuit, la journée. 

Le combat faisait rage. Tout les arréziens étaient au corps à corps avec des athéniens, formant une masse de fourrure et de poussière. Comme ils l'avaient appris depuis quelques années, les carnivores se battaient avec leurs dons. Ceux des Athéniens, certainement moins utile que leur adversaire...
Tayris combattait avec un félin. Il avait apprit à vivre avec eux, depuis quelques temps. Il avait bien fallut. ça avait été dur, mais il y était arrivé. Soudain, un Arrézien qui se battait aux côtés du coyote semblait en mauvaise posture. Sans hésitations, Tayris fit fuir son adversaire d'un puissant coup de patte et attrapa l'assaillant de son ami par la nuque. Il le secoua dans tout les sens avant de lâcher, sur le sol, le corps inerte d'une magnifique coyote Athénienne. Pendant quelques secondes qui semblèrent durer des éternités, l'animal gris ne pu détacher son regard du sien. 
C'est ainsi que le coyote vit pour la dernière fois le regard vert sapin de sa mère.

Tayris regarda de nouveau Luna, soupira. Encore un de ces moments de nostalgie... Des fois, je me dit que les choses seraient bien plus simple si les dons n'étaient jamais apparus. 

Tayris éluda ma question et fit une autre remarque. Cela m'agaça, cela dit, je réfléchis un instant à la remarque de Tayris. Que se serait-il passé si les Dons n'étaient pas apparus ? La guerre entre félins et canidés aurait continué. Et ça aurait été...
Moins drôle, pour utiliser des thèmes infantiles.

- Je ne suis pas d'accord, répondis-je d'un ton ferme avant de me justifier : la découverte des Dons nous on permis de savoir qui on était vraiment, et à quel clan on devait vraiment appartenir. Il était ridicule de se déclarer ennemis simplement parce que nos griffes étaient plus longues, que nos crocs étaient plus ou moins acérés, que nous avions un squelette différent, où que nous étions plus ou moins proches des Bipèdes... et puis si on retourne au début de l'histoire, je pense que les humains seraient encore ici, si les Dons n'étaient pas apparus.
Une sorte de petit ronronnement émana de ma gorge. J'étais de bonne humeur. Ce qui ne semblait absolument pas être le cas de Tayris.
Il repense... à son passé, qu'est-ce qu'il a ?

Tayris était songeur. Il pensait aux paroles que Luna venait de dire. 
Oui, c'est en partie vrai. Je suis bien content de m'être débarassé des bipèdes ! Mais j'aurais éviter bien des problèmes... D'un autre côté, si la guerre entre les canides et les griffes avait perpetuée, nous ne nous serions jamais rencontrés, ou alors sur un champs de bataille. Et je doute que ce soit le bon endroit pour faire la causette. Enfin bon... 
Le coyote soupira. Cette histoire est compliquée. 
Tu crois que c'est possible d'être de la même famille mais si éloigné ? Si lointain et si proche à la fois ? Penses-tu que c'est possible ? 

J'ouvris grand la gueule et baillai un bon coup.
Ouaaaaaaah**... ces discussions philosophiques à huit heures du matin... 
- Ben, oui, répondis-je bêtement.

J'eus un "sourire d'adolescente" (sourire légèrement narquois, même si bienveillant).
- Après tout, ajoutai-je plus sérieusement et avec une petite grimace, mes parents étaient bien des Athéniens, non ? 
J'eus un sourire amical.
- Arrête de te faire du mouron, Tayris, et cesse de te retourner pour ressasser le passé si tu ne veux pas te cogner dans le Poteau du Futur !
J'éclatai de rire puis soupirai d'aise. Nous étions si bien, à discuter...

**baillement

Tayris regarda Luna. 
Oui, tu as raison. C'est juste que... 
Le coyote cherchait ses mots. Juste que je me disais que la guerre fait faire des choses stupides. 
L'animal gris se leva, il avait soudainement chaud. Je ne serais pas contre un petit plongeon. 
Tayris se laissa couler dans l'eau presque glacée en comparaison. 
Alors comme ça les parents de Luna était Athéniens ? Nous ne sommes finalement pas si éloigné que je le pensais. Je me demande si... S'ils sont toujours en vie ? Il faudra que je lui demande un jour ou l'autre. Mais pas ici, cet instant est si beau ! 
Le veilleur prit son souffle et plongea sous l'eau. Tout était bien calme, d'un coup...

Tayris plongea dans l'eau fraiche. J'hésitai à le rejoindre, mais le ne fis pas, par simple flemmardise.
Fiou... finalement ces journées sont un peu ennuyantes.
- Bon ! m'exclamai-je soudain, il faut que je me dégourdisse, on va voir les Intellos ? Ariane et sa petite bande de copains ont pénétré sur nos terres, hier, et ça ne m'a pas plu. J'ai bien envie de lui montrer ce que j'ai fait à Cassiopée, elle pourrait me servir de modèle...
J'eus un petit ricanement et me mis en route pour les terres Athéniennes.

Tayris ocha la tête. 
Je n'y vois pas d'objections ! Le coyote sortit de l'eau, un petit sourire aux lèvres. 
Enfin quelque chose qui va me remonter le moral !  
Le temps que l'animal argenté s'ébroue, la panthère des neiges était déjà partie. 
Tayris couru pour la rattraper. 
Eh, attends moi ! 

[ On continue sur le territoire des Athéniens ? ]

Late, je verrouille.